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Hypothèses et suppositions sur les liens entre femmes et climat

Basées sur les recherches du CGAP, d’Agrofin et de Dalberg au Kenya (2022)
Une femme sort de l'eau en Tanzanie.

Début 2022, l'équipe du Women in Rural Agricultural Livelihoods (WIRAL) du CGAP a travaillé avec les conseillers de Dalberg et d’Agrofin pour tenter de comprendre comment les services financiers pourraient aider les femmes à atténuer les chocs climatiques et à s'adapter à leurs conséquences. Sept hypothèses ont ainsi été formulées sur le lien entre le genre, l'inclusion financière et le changement climatique. Ces hypothèses ne sont pas exhaustives, et ne peuvent être considérées comme universellement vraies - des variations peuvent exister d'une région à l'autre. Chaque hypothèse est fondée sur plusieurs suppositions.

Hypothèses et suppositions

Les femmes dépendent davantage des ressources naturelles, car elles sont responsables de manière disproportionnée de l'approvisionnement en nourriture, en eau et en carburant.

Les changements climatiques peuvent accroître les facteurs de stress sociaux et communautaires, exposant les femmes à un risque accru de violences sexistes et sexuelles.

  • Au Tchad, en raison de la sécheresse, les femmes et les filles sont obligées de parcourir de longues distances à pied pour obtenir de l'eau, ce qui les expose davantage au harcèlement et aux agressions sexuelles, et en raison de l'exode des hommes, les femmes restées sur place pour subvenir aux besoins de leur famille sont plus exposées à la violence et à l'exploitation sexuelles (Climate Change And Gender-Based Violence : What Are The Links ?).

Les chocs climatiques accroissent les déplacements de population. Les changements environnementaux accroissent les contraintes de temps et de mobilité des femmes.

Le travail domestique des femmes augmente en raison de leurs difficultés d’accès aux ressources naturelles (par exemple, l'accès à l'eau nécessite de parcourir des distances plus longues, ce qui prend plus de temps).

Les normes socioculturelles et les cadres légaux et réglementaires peuvent souvent limiter la capacité des femmes à détenir des biens immobiliers.

  • En Ouganda, les biens commercialisables représentent une part plus importante de la richesse des femmes que des hommes. Par conséquent, le capital des femmes tend à diminuer lorsqu'un ménage est touché par une sécheresse, tandis que les biens du mari ne sont pas affectés, car ce sont les biens des femmes qui sont vendus pour faire face à la situation. (Gender Dimensions Of Disaster Risk And Resilience)
  • Voir également le Global Gender Gap Report 2021 : les femmes ont des droits limités en matière d'héritage ainsi que d'accès et d'utilisation des biens fonciers et non fonciers.

Le changement climatique peut limiter la capacité des femmes à se déplacer librement (accès à l'école, aux formations et aux autres établissements d'enseignement). 

Le changement climatique est susceptible d’accroître les facteurs de stress sociaux et communautaires, exposant ainsi les femmes à un risque accru de violences sexistes et sexuelles.

Quand les hommes migrent à la recherche de nouvelles opportunités économiques, les responsabilités des femmes augmentent à la maison. 

  • Au Bangladesh, les femmes ont la responsabilité de nombreuses tâches domestiques non rémunérées, récurrentes et chronophages, qui incluent notamment la préparation des repas, la collecte des combustibles et de l'eau, et les soins aux personnes à charge. Sous l’effet de l'exode masculin, les femmes doivent également gérer les exploitations agricoles, diminuant le temps dont elles disposent. (Le changement climatique et le manque de temps piègent les femmes dans un cercle vicieux)

La propriété foncière est généralement détenue par les hommes et les lois relatives à la propriété foncière et à l'héritage sont souvent discriminatoires envers les femmes. 

Les femmes manquent souvent de ressources financières pour acheter des intrants (directement ou à crédit) ou des équipements.

Les femmes sont moins susceptibles de posséder des téléphones portables.

Les femmes ont moins confiance dans les services formels/les institutions financières.

Les solutions financières informelles peuvent être vulnérables au changement climatique car elles peuvent dépendre de réseaux de solidarité entre des populations proches qui seront probablement affectées simultanément par les effets d'un choc climatique (par exemple, les groupes d'épargne).

La fréquence des chocs covariants augmente avec les facteurs de stress climatiques.

Les femmes sont moins susceptibles de connaître et d’avoir accès à des intrants résilients au climat.

Les femmes ont moins accès à la formation (par exemple, aux services pédagogiques) et à l'information.

  • Dans certaines régions rurales de Tanzanie et du Burkina Faso, les femmes ne peuvent souvent pas participer aux formations et aux réunions où sont discutés les sujets relatifs au climat, en raison de normes qui restreignent la participation des femmes aux réunions publiques et limitent les interactions entre les sexes dans les espaces publics. (Gender-responsive rural climate services : a review of the literature)

Les femmes sont moins susceptibles de souscrire à une assurance agricole ou d’adopter des techniques agricoles résilientes face au climat.

Les femmes disposent de réseaux moins étendus pour obtenir avec précision des informations relatives aux prix des marchés.

Les femmes ont accès à moins d’informations sur les marchés et ont une moins bonne visibilité de la volatilité des prix, fortement accentuée par les événements climatiques : elles peuvent donc moins facilement se saisir des opportunités commerciales.

Les femmes ont moins de chances d'apparaître sur les listes de formations agricoles (un service d'éducation spécifique à la culture du maïs, géré par le gouvernement, par exemple).

Les contraintes de temps et de mobilité limitent la capacité des femmes à se rendre sur les marchés physiques. 

  • En Éthiopie, en cas d’événement ou de catastrophe climatique, les ménages dirigés par des femmes qui pratiquent des activités de petit commerce ne sont pas en mesure de maintenir leurs activités, car les responsabilités des femmes au sein de leurs ménages augmentent considérablement après de tels chocs. (Analyse rapide de genre : rapport de recherche)

Les connaissances des femmes dans le domaine numérique sont plus faibles, ce qui limite leur accès aux marchés numériques plus sophistiqués (sur les smartphones, par exemple). Elles sont aussi moins souvent conscientes de l’existence de ces derniers. 

  • Au Kenya, il est plus facile d’engager les agricultrices avec des canaux simples (par exemple, les SMS et les appels). Il est difficile pour les femmes d’utiliser des plateformes plus complexes (par exemple, les services et les applications basés sur l'USSD). Les agricultrices ont donc besoin de plus d’assistance et de conseils pour naviguer sur des plateformes numériques plus complexes. (Étude d'impact sur le genre)

Le commerce digital et les produits numériques sont moins adaptés aux capacités et aux besoins des femmes à faibles revenus.

En Ouganda, de nombreuses femmes n'ont pas les moyens d'acheter un téléphone portable, qui nécessite non seulement de couvrir le prix du téléphone mais aussi celui des recharges fréquentes. En outre, en raison des limitations en matière d'alimentation en électricité, les femmes peuvent ne pas être en mesure de charger leurs téléphones portables. Cela signifie que même lorsqu'elles y ont accès, elles ne peuvent pas nécessairement les utiliser. (Intégration de la dimension de genre dans l'agriculture numérique)

L'accès à des services financiers, notamment numériques, conçus pour les femmes peut leur permettre d'investir dans diverses solutions (semences ou technologies par exemple) et outils, y compris dans des actifs sociaux, qui peuvent les aider à diversifier et à renforcer leurs moyens de subsistance face aux facteurs de stress climatiques.

  • Au Kenya, les ménages dirigés par des femmes ayant adopté des comptes d'épargne digitaux ont vu leur niveau de pauvreté chuter et leur épargne augmenter, permettant ainsi à 185 000 femmes de quitter leurs emplois agricoles pour des postes plus fiables et mieux rémunérés dans le commerce ou la vente au détail, moins exposés aux risques climatiques. (L'inclusion financière numérique des femmes en Afrique)
  • Au Ghana, les femmes bénéficient d’un plan de financement d'actifs proposé par PEG Africa pour se procurer des pompes d'irrigation solaires, leur permettant d’augmenter le rendement de leurs cultures et leurs revenus grâce au temps et au travail économisés. (Savings At The Pump : Financing Solar Irrigation To Support Rural Women)
  • Au Nigeria, 20 000 agricultrices utilisent la plateforme d'épargne de HerVest. Celle-ci les informe sur les meilleures pratiques agricoles, leur permet d'accéder au crédit, de se procurer des semences et des engrais de qualité, mais elle leur fournit également des informations et un accès à des marchés de qualité grâce à un modèle de financement mixte. (HerVest)

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