Interview FinDev

Qu’est-ce que le financement participatif et comment pourrait-il contribuer à l’inclusion financière ?

Entretien avec Marloes Noppen de Symbiotics en préparation de la Semaine européenne de la Microfinance
Marloes Noppen

Marloes Noppen gère les relations avec les investisseurs auprès de Symbiotics Netherlands BV. Elle comptabilise 5 années d’expérience en matière d’investissement d’impact et prodiguait avant des conseils en matière d’investissement d’impact tant pour les fonds que les investisseurs privés. Elle est aussi la directrice financière de Symbiotics Netherlands. Marloes se concentre surtout sur le point de convergence de l’impact et du rendement.

Le financement participatif gagne en popularité partout dans le monde.  Certaines plateformes se spécialisent dans les investissements d’impact.  Quels acteurs apportent un financement participatif en faveur de l’inclusion sociale ? Qui sont les contributeurs sur ces plateformes et quels projets financent-ils ? Dans le cadre de la Semaine européenne de la Microfinance cette année, Marloes Noppen participera à un panel sur le financement participatif avec des représentants de Babyloan, Lendahand, LITA.co et Mekar, qui tenteront de répondre à ces questions. Portail FinDev s’est entretenu avec elle en amont pour avoir un aperçu des questions qui seront discutées.

FinDev : Qu’est-ce que le financement participatif ?  Quel est son fonctionnement et dans quelle catégorie le classeriez-vous ou à quelle famille de financement appartient-il ?

Marloes : Le financement participatif porte bien son nom puisqu’il repose sur la participation d’un grand nombre de personnes. Il est répandu au niveau international et se décline en diverses formes : Prise de participation, instrument de dette, achat anticipé de produits ou donation. Le profil des contributeurs peut aller de l’investisseur de détail à l’investisseur institutionnel. Le financement participatif permet une grande souplesse et échappe ainsi presque à toute catégorisation. Il appartiendrait toutefois résolument à la famille des solutions de technologie financière. 

FinDev : A quoi ressemble le paysage du financement participatif dans le secteur de la finance inclusive ?  Comment a-t-il évolué ?  Où est-il le plus sollicité sur la planète et pour quel type de projets ?

Marloes : Le financement participatif en finance inclusive a, à bien des égards, connu la même évolution que la finance inclusive elle-même.  L’activité sans but lucratif d’origine a, de plus en plus, glissé vers la recherche du profit et est désormais plus étroitement supervisée. Il s’est d’abord agi de donner des fonds aux institutions de microfinance au travers de récits vendeurs concernant les utilisateurs finaux. Des organisations telles que Kiva (asbl) se mirent à proposer aux IMF des prêts sans intérêts. D’autres plateformes telles que les français de Babyloan leur emboîtèrent le pas.  Actuellement, les bailleurs participatifs sont, pour la plupart, régulés et un grand nombre d’entre eux poursuivent un but lucratif. A titre d’exemple, Lendahand et Plumseeds basés en Europe sont des plateformes de financement participatif opérant comme des sociétés d’investissement à but lucratif. Lendahand sert une clientèle de détail tandis que Plumseeds ne vise que les institutions professionnelles.  

Alors qu’au début, bon nombre de ces plateformes furent créées sur des marchés développés, nous observons désormais la multiplication de ces plateformes de financement participatif sur les marchés émergents. Milaap en Inde et Mekar en Indonésie en sont des exemples éloquents. Elles se concentrent principalement sur le financement des PME et de la microfinance mais un certain nombre de plateformes ont commencé à inclure d’autres services essentiels tels que l’enseignement et l’énergie renouvelable.

FinDev : En quoi, selon vous, le financement participatif peut-il accélérer l’inclusion financière ? Peut-il véritablement être financièrement avantageux pour les clients exclus ou mal desservis ?

Marloes : Le financement participatif est un outil puissant car, contrairement à la finance traditionnelle, il est accessible au plus grand nombre.  Le cercle des investisseurs s’élargit donc au-delà des investisseurs spécialisés. Durant des années, nous avons, dans le secteur, évoqué la généralisation de l’investissement d’impact (qui, dans une vaste mesure, est un outil de finance inclusive). A cette fin, le financement participatif est un instrument unique en son genre. Apportera-t-il vraiment une avancée pour les clients financièrement exclus ou mal desservis ? Cette question nous taraude depuis un certain temps. Nous avons procédé à des recherches extrêmement rigoureuses afin de déterminer si la microfinance générait vraiment un impact parmi les clients financièrement exclus ou mal desservis. Les résultats ne sont pas concluants. Il serait naïf de prétendre que le financement participatif (s’adressant, dans une grande mesure, aux mêmes institutions financières) puisse générer un impact différent.  Pour de nombreux clients finaux, les modalités de financement de ces institutions financières demeureront presque invisibles. Ce que nous savons, c’est que le besoin de financement existe et que plus nous parviendrons à mobiliser des capitaux, plus nous réduirons l’écart.   

Pour l’investisseur, l’attrait réside dans la possibilité de sélectionner directement son opportunité d’investissement préférée. Il peut ainsi choisir et retenir des placements spécifiques conformes à ses propres valeurs et son appétence. 

FinDev : Pouvez-vous citer des exemples de plateformes qui réussissent à aider les investisseurs de détail partout dans le monde de financer des microentreprises et des PME basées en Afrique ?

Marloes : Selon nous, le succès d’une plateforme repose sur trois éléments :

  • la constance du flux des projets. De nouveaux projets sont présentés en continu. Les bénéficiaires ont fait l’objet d’une analyse rigoureuse incluant l’incidence ;
  • le professionnalisme et la communication transparente au sujet des risques ;
  • la fidélité et l’engagement des participants.

Energise Africa, qui se concentre exclusivement sur l’énergie renouvelable, réunit ces éléments. 

FinDev : Quid de la réglementation en matière de financement participatif ? A titre d’exemple, comment les clients (prêteurs et emprunteurs) sont-ils protégés ? Les plateformes de financement participatif sont-elles soumises à une quelconque réglementation ? 

Marloes : Il convient d’envisager les plateformes de financement en ligne comme un canal de financement supplémentaire pour les institutions financières. La majorité des capitaux provient toujours des IED et des grands investisseurs institutionnels. Presque sans exception, les institutions financières sont régulées car le secteur s’est professionnalisé.  Le financement participatif emprunte la même voie. Un nombre croissant d’organes de régulation exigent des opérateurs de plateformes de financement participatif la possession de licences spécifiques. En UE, c’est le plus souvent une licence MiFID (en vertu de la directive sur les marchés d’instruments financiers) qui est exigée des sociétés d’investissement. Tant Lendahand que Plumseeds opèrent sous cette licence, qui pose des exigences sévères en matière de procédures et de processus afin de protéger l’investisseur et le bénéficiaire.    

FinDev : Quels sont les principaux obstacles et défis ralentissant le développement du financement participatif dans les pays à faibles revenus ? 

Marloes : La maturité du secteur financier constitue le principal défi en matière de développement du financement participatif dans les pays à faibles revenus. Même dans des pays mûrs comme les Pays-Bas, le régulateur n’a pas de vision claire quant à la façon de réglementer les sociétés de financement participatif. A nos yeux, la régulation du secteur progresse mais le phénomène demeure relativement récent et limité.  Dans un certain nombre de pays à faibles revenus, les capitaux sont une denrée rare et sont souvent de nature informelle. Ces pays ne sont peut-être pas le terrain le plus propice au développement du financement participatif.  Pour autant, il existe, dans des pays à faibles revenus, des exemples très intéressants dont Mekar en Indonésie fait partie. 

Commenter

Les commentaires sur cette page sont modérés par les éditeurs du Portail FinDev. Nous validons les commentaires qui apportent des perspectives et des idées pertinentes pour cet article. Pour en savoir plus.

WhyDonate , WhyDonate, France
05 mai 2023

Merci pour le partage de ce super contenu. Le financement participatif est un outil que les organisations, les entreprises et les particuliers peuvent utiliser pour tout type de projet, y compris la collecte de fonds pour les dépenses personnelles, le démarrage d'une entreprise, les causes philanthropiques et les efforts créatifs. Un thermomètre numérique de collecte de fonds est un outil qui vous aide à mesurer l’efficacité de votre initiative de collecte de fonds.

https://whydonate.com/fr/blog/thermometre-de-collecte-de-fonds-de-chari…

Laisser un commentaire